Voici la présentation faite aux enfants au début de l’année scolaire:

«Il y a eu des hommes et des femmes si bons, si généreux qu’ils ont donné tout ce qu’ils possédaient aux autres. Certains ont même donné leur vie pour servir les autres.

Il y a eu des hommes et des femmes si remplis de douceur et d’amour que tout le monde recherchait leur compagnie. Même les animaux les plus craintifs demeuraient auprès d’eux.

Il y a eu des hommes et des femmes qui avaient tant de sagesse que les gens venaient de loin pour leur demander conseil.

Il y a eu des hommes et des femmes si simples, si humbles, que la nature leur a fait don de ses plus grands trésors et de ses secrets pour qu’ils puissent guérir les malades.

Il y a eu des hommes et des femmes si courageux dans leur lutte pour la justice qu’aucun obstacle ne pouvait les arrêter.

Ces hommes et ces femmes sont appelés des saints. Même s’ils ne sont plus parmi nous, personne ne les oublie. Leur vie extraordinaire continue à rayonner sur la terre comme le rayonnement d’un phare sur le rocher, guidant les marins à bon port.»

Le plan scolaire conseille de raconter aux enfants, pendant la 2e classe, des légendes de la nature, la vie des saints et des fables d’animaux. Pourquoi ces récits à cet âge précis ? Comment sont-ils reçus et vécus dans l’actuelle 2e classe ? J’aimerais partager ici quelques réflexions et expériences.

Tout au long de la 1re année, les enfants ont baigné dans le monde des contes. Par les images qu’il véhicule, le conte fait vivre à l’enfant intérieurement des polarités (bon/mauvais) tout en garantissant une unité et un déroulement qui mène vers une solution certaine. L’enfant s’identifie au héros, qui, traversant maints dangers et épreuves, trouvera la clé, la coupe recherchée. A l’image du conte, l’enfant a besoin d’avancer en toute confiance dans le monde auquel il se sent complètement lié. Son être reste entièrement enveloppé dans la certitude de l’unité.

Puis passant en 2e classe, les enfants gagnent en force physique. Leur présence est plus affirmée, leur regard plus éveillé et dirigé. Ils posent des questions comme, par exemple : «Est-ce vrai?»

A travers les légendes de la nature, chaque plante ou pierre, aussi petite qu’elle soit, reçoit sa place dans l’univers. Toute chose, dans sa qualité propre, a son rôle important. Dans les légendes des vies des saints, les enfants entendent parler des qualités nobles des êtres humains. Les saints cheminent à travers des sacrifices, de dures épreuves ou de renoncements vers un idéal. Chaque vie de saint reflète l’aspiration à (re-)trouver le lien avec le divin.

Ainsi, au début de l’année scolaire, j’ai raconté la vie de saint Brendan, qui, avec une confiance inébranlable a su se laisser guider par Dieu jusqu’à l’île du paradis.

Saint Georges a eu le courage d’affronter le terrible monstre pour délivrer toute la ville du danger menaçant.

Saint Maurice avait une telle droiture et sincérité que rien ne pouvait le détourner de son chemin.

Pour Saint Martin, étaient-ce sa bonté et son humilité qui lui ont donné le courage nécessaire pour suivre son idéal ?

Sainte Odile, née dans l’obscurité de la cécité, a répandu clarté et lumière autour d’elle. Sa pureté a eu la force d’adoucir le cœur de son père cruel.

Chaque enfant a écouté ces récits avec une attention profonde et avec vénération. Ces vies exhalent un parfum pur et rayonnent d’une lumière qui nous porte.

Depuis le mois de janvier j’ai raconté des fables. Quel contraste ! Les enfants ont été très surpris, ne sachant pas quoi en faire. Ils ne pouvaient ni « baigner » dans ces récits, ni vibrer avec. Ce que je racontais restait « suspendu » dans la classe. Leurs remarques à la fin étaient la preuve d’une certaine distance. Sous l’aspect de différents animaux, ils découvraient des qualités humaines moins idéales, comme la jalousie, la gourmandise, la lâcheté, la fausseté, la vanité etc. Ces caractéristiques, bien que présentées avec beaucoup d’humour et de légèreté, ne faisaient pas vraiment rire les enfants. Aussi n’était-il pas nécessaire d’énoncer la morale à la fin des récits. Ceux-ci parlaient d’eux mêmes.

Tout au long de la 2e classe, l’enfant entend parler du monde d’une nouvelle manière. Emergeant d’un monde plein de rêves à l’image du conte, l’enfant passe à un monde d’êtres humains portés par des aspirations d’une dimension infinie, à l’image des saints. L’enfant est accompagné par les récits dans son cheminement pour trouver lui-même sa place, petit à petit, au sein des êtres humains.

Plus tard, les enfants entendront parler de Dieu, de sa volonté de créer le monde et l’être humain. La Bible leur révèlera comment l’être humain a pris sa place sur la terre, comment il a commencé à travailler pour son pain et s’est construit un toit pour s’abriter. Tout cela est une belle perspective pour la 3ème classe, autant du point de vue des récits que du travail pratique.

Françoise Burger
publié dans la revue La Vie de l’Ecole de Pâques 2001