160217_entretien-chretien_1Johann Chrétien est professeur de français et d’histoire à l’école Rudolf Steiner de Lausanne depuis août 2014 dans les grandes classes. Jean-Pierre Bars et lui ont évoqué au cours d’un entretien quelques aspects de l’expérience de monsieur Chrétien dans l’école.

Jean-Pierre Bars: Tu découvres la spécificité de la pédagogie Steiner. Peux-tu nous raconter comment tu vis cette rencontre?

Johann Chrétien: Tout d’abord merci de m’offrir cet espace de parole pour exprimer des sentiments liés à une rencontre tant désirée. Ma rencontre avec la pédagogie Waldorf Steiner est un de ces moments clés où de nombreux éléments récoltés lors de visites et promenades prennent sens lorsqu’ils sont rassemblés en un seul instant. C’est une rencontre très vivifiante pour l’esprit dans le sens où ma représentation du monde est fertilisée. A la manière d’un paysage travaillé par un artiste, des arbres et des plantes sont taillées pour laisser passer la lumière, de nouvelles plantes germent, et une nouvelle harmonie des couleurs se fait jour.

Le point le plus marquant est la place centrale laissée à l’observation du développement individuel de l’enfant et à la liberté offerte au pédagogue d’accompagner ce développement au sein d’un groupe hétérogène.

J’ai l’opportunité de me former à la pédagogie pour les trois années qui suivent et j’en tire de grands bénéfices tant pour la construction de mes cours et pour les élèves, que pour mon propre développement personnel.

J.-P.B. Quels points forts retires-tu de ton travail dans les grandes classes?

J.C. Actuellement, mon travail dans les Grandes Classes est très motivant puisque cet espace est le lieu de nombreux défis: il semble qu’un cycle soit en train de se terminer pour s’ouvrir sur un autre, les élèves, les parents, les enseignants sont au centre d’un changement social majeur. Notre pédagogie et donc notre école dans toute sa dimension cherche à répondre aux besoins des générations qui se font jour actuellement. C’est travail à la fois ardu et enthousiasmant, notamment en ce qui concerne la place des images. Celles-ci, envisagées d’un point de vue plastique mais aussi intérieur de même que le lien entre l’omniprésence des images et du «sens» au quotidien m’interrogent fortement.

Les élèves ainsi que les parents se posent de nombreuses questions liées au devenir de leurs enfants et des apports originaux de notre pédagogie. Ces questionnements ont pour but de nous aider à trouver de nouvelles formes, de nouvelles significations, à réinventer les relations.

J.-P.B. Comment vois-tu l’évolution de ta participation à la vie de l’école?

J.C. J’arrive à la moitié de ma deuxième année dans l’école et je commence à sentir le poids que peut représenter la gestion d’une école autogérée. Historiquement, l’école se veut indépendante pour des raisons auxquelles j’adhère, mais ce choix s’avère difficile à tenir dans le temps pour de nombreuses raisons. La transition entre les générations n’est pas évidente, elle fait partie des efforts de renouvellement.

La vie de l’école est très gourmande en énergie, non seulement je suis enseignant mais je remplis aussi un certain nombre de tâches. Cette année j’assiste un collègue dans l’élaboration des emplois du temps des enseignants et des élèves; je participe au développement de la démarche qualité dans l’école, je seconde tant bien que mal des collègues pour l’entretien du site et enfin je joue le rôle de secrétaire du Conseil des grandes classes… toutes ces tâches donnent parfois le vertige mais, au final, tout cela est très stimulant pour la créativité!

J.-P.B. L’école fêtera l’année prochaine ses 40 ans d’existence, c’est à la fois une commémoration et un tremplin pour l’avenir. Quelles seraient pour toi la/les perspective(s) idéale(s) pour l’école?

L’école fêtera ses 40 ans et moi aussi! Que souhaiter pour l’école? Une vie encore longue et rieuse, pleine de surprises, de haut, de bas, de réussites et d’échecs autant assumés l’un que l’autre, et tout aussi instructifs. Il serait bon, me semble-t-il, que l’école s’ouvre davantage vers l’extérieur, elle a acquis une certaine maturité, elle pourrait relever de nouveaux défis: renforcer le rôle de la nature dans la pédagogie, soigner le territoire de Bois-Genoud, devenir un centre d’innovation pédagogique, envisager une voie diplomate, accueillir de nouveaux élèves dans les grandes classes…

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