Les droits de l’enfant (alliance for childhood)

Conférence de Madame Dr. med. Sibylla Meystre
Madame Meystre nous emporte vers un aspect concret des droits de l’enfant à travers une nouvelle association « Alliance for Childhood », dont Madame Mehrtens est la responsable en Suisse (Bettina Mehrtens, Grundstrasse 12, CH– 8134 Adliswil).

Pourquoi une telle alliance, vu l’existence de la « convention des droits de l’enfant » fondée par les Nations Unies le 20 novembre 1989 ? (La Suisse a ratifié cette convention au printemps 1997).
Cette convention veut garantir un respect pour l’enfant, veiller à son bien, à sa santé et son développement. Des efforts supplémentaires existent au niveau international de voulant agrandir le protocole de cette convention au domaine qui concerne l’exploitation commerciale et la vente d’enfants, l’exploitation des enfants par la pornographie et la prostitution, la pédophilie et les abus sexuels, le problème croissant du SIDA.

Pourquoi donc ajouter la création de « l’Alliance for Childhood » ?
Cette création a été réalisée par plusieurs éducateurs dans l’enseignement Waldorf, alertés par les menaces grandissantes sur la petite enfance. L’initiative a créé un noyau de gens en 1998 pour étudier les effets pédagogiques, médiatiques et politiques menaçant la petite enfance. Cela a abouti à la fondation de « l’Alliance for Childhood » (~ Alliance pour le droit de l’enfance) le 25 novembre 1999 à Bâle.
La base de cette fondation est l’Anthroposophie et la pédagogie de Rudolf Steiner. Mais l’action et la recherche de cette alliance ne veut pas se restreindre au cadre anthroposophique seulement, elle cherche du contact international et la collaboration avec des organisations diverses qui s’engagent pour les besoins de l’enfant; elle collabore par exemple avec la « Kinder-Lobby Suisse ».

Les buts de « l’Alliance for Childhood » sont les suivants :

  • Le droit à l’enfance comme évidence pour chaque être humain.
  • Une orientation pédagogique qui accorde le temps nécessaire à l’enfant pour s’investir dans le monde, qui donne de l’importance au rythme, au jeu libre et créatif etc.
  • Etudier l’influence des médias, de l’ordinateur, de la technique sur le développement et le comportement de l’enfant, et rassembler les résultats dans un but d’application pratique en éducation.
  • Protéger l’enfant d’une commercialisation excessive (jouets, habits, médias, nourriture, etc.)
  • Protéger l’espace vital de l’enfant pour le jeu et le développement de son indépendance.
  • Stimuler une collaboration entre pédagogie, éducation et médecine à l’égard de l’enfant.
  • Investir dans un travail scientifique pour mieux cerner l’aspect global de l’être humain en devenir.

Actuellement, les menaces sur la petite enfance sont grandes. Les pouvoirs politiques et économiques essaient de mener à terme des spéculations éducatives au détriment du petit enfant (scolarisation à l’âge de 4 ans avec le but de créer des classes de base contenant des élèves de 4 à 8 ans—voir « Basisstufe » en discussion en Suisse Alémanique comme innovation !). Introduction de l’Anglais comme première langue étrangère à l’école. Introduction de l’ordinateur dès le jardin d’enfants etc. avec la devise: « préparer les enfants au mieux pour demain sans perdre du temps ».

Le professeur Herzle, pédopsychiatre à Zurich constate que l’enfant subit aujourd’hui intensément l’influence de notre société. Cette influence peut causer des souffrances, des maladies (dépression, psychose, suicide etc.) et peut également créer des angoisses immenses (guerre, déracinement, globalisation mondiale, violence, drogues, abus sexuels etc.) Nous, les adultes dans le monde entier sommes responsables des menaces et des dangers qui touchent l’enfant.

Il faut impérativement prendre conscience de cette situation qui se dégrade rapidement. Des organisations sont à créer qui se battent pour le respect de l’enfant, en particulier du petit enfant, les besoins primaires de l’enfant concernent le niveau social, émotionnel, relationnel et corporel. Là-dessus se construisent les compétences primaires de l’enfant qui excelle en spontanéité, mobilité, créativité. Les compétences secondaires de l’adulte ne doivent en aucun cas supprimer les compétences typiques de l’enfant.

Voici une tâche de « l’Alliance for Childhood » ! Dans un terme plus vaste, l’Alliance for Childhood travaille dans un esprit salutogène (voir « salutogénèse », définition d’un médecin Anglais il y a environ 5 ans). L’enfant est pris en considération sur un plan physique, psychique et spirituel. Le médecin Emmy Pikler (femme pédiatre hongroise) a beaucoup travaillé dans ce sens en plaidant pour le temps nécessaire et individuel de chaque enfant dans son évolution.

Tout enfant a besoin d’amour, de compréhension et de temps ! Ces besoins veulent se réaliser dans les jardins d’enfants, mais pas dans une scolarisation soi-disant ludique dès l’âge de 4 ans.

Soyons attentifs et participons à la dignité et à la protection de l’enfant !

 

Où est la place du petit enfant dans notre monde ?

Conférence de Madame Danièle Bateydier
Nous pouvons commencer par nous poser les questions suivantes:

  • Où est la place de l’enfant, est-elle définie ?
  • Qui est l’enfant qui vient de naître ?

Selon Rudolf Steiner : « L’enfant qui vient de naître n’est pas une page blanche. Il est un projet vivant. »

L’enfant est une personnalité dans un corps inadapté qui pendant la première septaine va s’émanciper, se mettre debout, avoir sa propre démarche, se reconnaître. Le bébé sera soutenu par la famille, la communauté et pris par l’enveloppe mondiale. Il apporte à sa naissance son monde et c’est à nous de percevoir quel est son destin, vers quoi il veut tendre, quelle est sa particularité. N’imprimons pas notre personnalité sur l’enfant mais soyons l’outil de son autoéducation.

Dans le passé les enfants naissaient et mourraient comme des mouches. Ils n’étaient reconnus qu’à l’âge de 7 ans, on ne connaissait souvent pas le nombre d’enfants que l’on avait. Nos grands-parents ont souvent vécu dans la pauvreté, mais ils avaient un amour simple et profond pour leur enfant.

Maintenant, les pays pauvres regardent les pays riches avec envie, mais ils découvrent les maladies psychiques, le stress, la peur, les vaccins et la survaccination…)

L’enfant naît dans un monde pauvre en matière vivante (plastique) et malgré l’abondance des jouets il s’ennuie dans sa chambre et recherche la proximité des adultes. Il a besoin de toucher les réalités du monde en touchant des matières vivantes (bois…) et en imitant l’adulte. En vivant ses propres expériences il se pose au milieu du monde; ce n’est que lui qui peut se dire que la flamme « brûle ». L’enfant qui ne peut vivre d’expériences se résigne. Nous-mêmes nous acceptons nos propres réussites ou défaites alors n’en privons pas l’enfant.

Un enfant cherche souvent ses limites et c’est là qu’il a besoin que l’adulte se positionne par rapport aux limites ou « enveloppes ». Les limites sécurisent l’enfant et le renvoient à lui-même. L’enfant prend confiance en l’adulte, il sait qu’il peut s’appuyer sur lui quand celui-ci s’engage par le « oui » ou le « non ». L’adulte est véridique tout en gardant les nuances que l’on apprend par le corps. La perception de l’enfant passe par son corps. Il est dans l’acte puis l’acte vient dans la pensée. Vers 6 ans, il a besoin d’être plus dans la réalité. Le petit enfant vit dans le mouvement puis se lie par la parole.

Le chant est à la base de ce développement du langage, mais il est tout aussi important de bien parler autour de l’enfant dans un monde où l’on se parle de moins en moins. En grandissant, l’enfant se distancie de la petite enfance tout en créant des ponts (nourriture, parole). Par la nourriture le monde entre en nous. Il y a une multitude de manières de manger. L’enfant ne se laisse jamais mourir de faim. Il est important de créer en délicatesse le rendez-vous avec la nourriture; si le rendez-vous est manqué on ne peut pas rencontrer le monde.

Dans certains jardins d’enfants officiels en France, l’enfant reste 8 heures par jour alors que l’adulte réclame la semaine de travail de 36 heures ! Les jardins d’enfants Rudolf Steiner permettent à l’enfant de tâter le monde, de faire des projets sous une aile bienveillante. L’enfant arrive dans un lieu où les autres enfants ne l’attendent pas, sauf la jardinière. Il y a un brouhaha qu’il doit décoder, les minutes sont des heures, la jardinière doit permettre le passage de la maison au jardin d’enfants où l’enfant va vivre des expériences des sens (pain…)et aider à construire un pont de confiance.

C’est en donnant une qualité au geste et du temps au temps que l’enfant qui nous regarde au plus profond de nous-mêmes voit qu’il y a une place pour lui. L’enfant a besoin de racines réelles, même si on oublie les racines pour ne voir plus que la fleur. La première septaine est faite pour être oubliée. Il va retenir pour « vrai » ce qu’il a retenu dans son monde physique (actes). Le monde moderne est positif si je fais des choix en triant ce que je veux laisser atteindre mon enfant.

Corine Frossard
publié dans la revue «La Vie de l’Ecole» de Noël 2001

 

Parution d’une brochure du Dr. Berron

Joachim Berron : « Valeurs et périls pour la vie de l’enfant », collection « Conscience et santé », 2001. Editions Anthrosana, CP, 4144 Arlesheim. 
48 pages. Fr. 7.–, port en sus. ISBN 2-9513168-5-2.
L’enfant, qui voudrait être accueilli dans un véritable foyer, arrive sur terre nu, infirme et ignorant. Contrairement à l’animal, qui naît déjà avec un ensemble d’aptitudes spécialisées, l’enfant doit tout apprendre. Pour cela, il a besoin de parents attentifs qui puissent le guider au travers de toute une série d’étapes de développement pendant de nombreuses années. Les parents, qui agissaient autrefois par tradition, se trouvent bien démunis aujourd’hui pour faire face à l’éducation de leurs enfants. Ils sont confrontés aux idées éducatives régnantes basées sur l’adaptation, la sélection et la mutation, lois valables pour les règnes de la nature mais non pas pour l’homme. L’homme aspire à l’indépendance, à la promotion, aux développements successifs lui permettant de reconnaître et de réaliser son projet existentiel. Pour atteindre ce but, il a besoin durant son enfance de protection, d’assistance et d’amour.
Le Docteur Berron, au bénéfice d’une longue expérience, propose aux parents de cheminer en fonction de valeurs fondamentales exprimées par les paroles de Rudolf Steiner : « L’enfant s’attend en lui-même à ce que le monde soit moral, beau et vrai ». Ce n’est pas le spectacle qu’offre le monde, où le pire côtoie le meilleur. Cependant, comme l’enfant voit le monde par les yeux de ses parents, c’est à eux de l’aider à percevoir ce qui dans son environnement correspond aux trois idéaux auxquels aspire de tout temps la nature humaine. Ils sont faits sur le modèle suivant :
Le Vrai qu’on ne peut que penser,
Le Beau qu’on ne peut qu’aimer,
Le Bien qu’on ne peut que faire.
Ceci lui permettra d’acquérir peu à peu les facultés propres à son humanité. Elles sont fortement menacées à notre époque. Pour cela il doit :
Prendre pleinement possession de son corps,
Acquérir le langage (et auparavant la station verticale, qui lui permet de s’élever au-dessus de ses organes et de passer du cri à la parole),
Accéder à l’éveil de la conscience dans ses ressources affectives, rationnelles et spirituelles,
Conserver la mémoire de sa personne et de ses origines.

Ce petit livret est un guide précieux appelant par son langage clair, sobre et condensé, à discerner entre ce qui peut élever l’enfant à sa dimension d’homme fait de corps, d’âme et d’esprit, et ce qui peut l’abaisser à l’unique dimension de son corps et ses organes. Il parlera à tout parent désireux d’agir avec bon sens, en restant dans les pratiques simples de la vie domestique.

Dorothée Dénéréaz
publié dans la revue «La Vie de l’Ecole» de Pâques 2002